La France a, un temps, caressé l’idée de développer une filière de réacteurs nucléaires à neutrons rapides. Puis l’idée a été abandonnée. Dans le contexte de lutte contre le changement climatique, tel le (super)phénix, la technologie semble sur le point de renaître de ses cendres.

Il y a un peu plus d’un an, dans le cadre de son plan d’investissement « France 2030 », le Gouvernement lançait un appel à projets doté de 500 millions d’euros pour soutenir le développement de nouvelles technologies au sein de la filière nucléaire. Il y a quelques jours, les deux premiers lauréats ont été désignés. Deux lauréats qui ont pour point commun de miser sur la technologie des neutrons rapides. Une technologie dont les atouts avaient déjà été explorés en France dès les années 1960. Au cœur du réacteur expérimental Rapsodie, mais aussi du réacteur de démonstration Phénix et du réacteur tête de série Superphénix. Tous ces projets ont été arrêtés. Tout comme le projet ASTRID qui devait être mis en service en 2020.

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Un retour aux réacteurs à neutrons rapides par le biais des SMR

Mais des connaissances et une certaine expérience ont été acquises en la matière. Et l’arrêt des projets n’a pas rimé avec la perte de ces savoir-faire. Aujourd’hui, dans le contexte nouveau de lutte contre le changement climatique, c’est donc le Gouvernement qui décide de donne une seconde chance aux réacteurs à neutrons rapides (RNR) en accordant une enveloppe de 25 millions d’euros à Naarea, pour le développement de son petit réacteur à sels fondus de 40 MWe nommé XAMR (eXtrasmall Advanced Modular Reactor) et à Newcleo pour celui de son SMR à caloporteur plomb de 30 MWe baptisé LFR 30.

Rappelons que l’un des avantages majeurs de la technologie RNR, c’est que les neutrons rapides sur lesquels elle compte sont plus énergétiques que ceux exploités aujourd’hui dans les réacteurs du parc nucléaire français. Et qui dit plus énergétiques dit aussi plus à même de provoquer la fission de plus d’isotopes que ceux que les physiciens qualifient traditionnellement de fissiles. En d’autres mots, les RNR peuvent être alimentés non seulement avec de l’uranium 235, comme les réacteurs actuels, mais aussi avec de l’uranium 238, qui constitue 99 % de l’uranium naturel et que la France a jusqu’ici soigneusement mis de côté, ou encore avec du plutonium, un « déchet » de notre parc de réacteurs nucléaires.

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Deux premiers projets soutenus avant d’autres ?

L’ambition affichée de Newcleo est ainsi « de mettre en service en 2030 un réacteur de démonstration ainsi qu’une unité pilote de combustibles innovants ». Le tout permettant « de créer d’ici là en France plus de 500 emplois directs qualifiés, grâce à un investissement global allant jusqu’à 3 milliards d’euros ». Naarea, de son côté, annonce « la mise en service d’un prototype pour 2027 » et « la construction d’une usine de fabrication et le lancement de la production en série d’ici 2030 ». Le tout accompagné d’un « investissement de 2 milliards d’euros et de la création en France de 1 000 emplois ».

Plusieurs autres projets ayant d’ores et déjà répondu à l’appel à projets « Réacteurs nucléaires innovants » font aussi le pari des neutrons rapides. C’est le cas, par exemple, de Neext Engineering ou encore d’Hexana. Le Gouvernement précise que l’instruction de ces dossiers se poursuit.

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